Pierre CATTELAIN1. GERER SA TRESORERIE CONCERNE TOUTES LES LIGNES DU BILAN
Dans le haut du bilan, on trouve les éléments qui durent des années : le capital, les bénéfices accumulés au fil du temps et les emprunts (les capitaux « permanents ») qui servent à financer les investissements (les immos des comptables).


Au milieu, on trouve les éléments qui durent des semaines : l’argent qui est dans stocks, qu’on possède mais qui traîne chez les clients. De l’autre côté (le passif) l’argent qu’il va falloir sortir mais qu’on garde provisoirement en profitant des délais de paiement des fournisseurs, de la TVA, de l’URSSAF, etc.
En bas du bilan, la trésorerie « se débrouille », jour après jour, pour que tous les éléments tiennent debout ensemble.


La trésorerie n’est pas indépendante des autres éléments du bilan. Elle est « ce qui reste » quand toutes les autres décisions ont été prises :

INVESTISSEMENTS ET EMPRUNTS

Trop souvent encore, les bilans sont affaiblis par des décisions malheureuses : la trésorerie semblait confortable et l’investissement a été  payé au comptant pour éviter d’être « collé » avec la banque pendant des années.
Il ne faut jamais financer des investissements en épuisant la trésorerie. Mais recourir au crédit bail (financement de 100 % du TTC) ou à l’emprunt (financement de 70 à 80 % du HT).
L’emprunt pèse momentanément sur le disponible (voir ci-dessous TVA). Mais il augmente les capitaux permanents et contribue à la robustesse du bilan.
Se battre (en 2011, alors que les taux d’intérêt restent historiquement bas) sur la durée de l’emprunt pour que l’amortissement couvre le montant du capital à rembourser. Laisser le banquier gagner sur les taux d’intérêt (emprunter 50 000 euros sur 4 ans à 5% plutôt qu’à 4% coûte environ 17 euros par mois).

STOCKS ET CLIENTS

La tenue des stocks est un autre sujet. Mais, financer sur la trésorerie des stocks qui perdent en réalité 20 ou 30 % de leur valeur par an reste déplorable (nous n’oublions pas le bémol du service à rendre aux clients).

On ne perd pas de client à faire respecter les délais de paiement prévus contractuellement. Encore faut-il que les conditions générales de vente soient jointes aux devis ou aux contrats et qu’elles prévoient des pénalités de retard et une clause pénale réellement dissuasives.

L’affacturage (factoring) semble coûteux. Il indisposerait certains clients.
Mais cette technique est devenue habituelle et tous les clients savent aujourd’hui régler un factor, plutôt que leur fournisseur.
Relativement au coût, il doit être comparé à celui d’un découvert. Enfin, l’affacturage évite de présenter des bilans affaiblis et de voir sa note financière dégradée.

FOURNISSEURS

Nos grands pères voulaient encaisser les clients à 30 jours et régler les fournisseurs à 90. Aujourd’hui, il n’est pas possible d’obtenir qualité, délais, livraisons fractionnées, etc. et de ne pas payer. La règle est de régler les fournisseurs avec un délai identique à celui du paiement des clients. On ne fait plus sa trésorerie sur le dos des fournisseurs.

TVA DEDUCTIBLE

Contrairement à une ancienne croyance, demander le remboursement des crédits de TVA ne provoque pas de contrôle fiscal. A l’inverse les délais de l’administration fiscale sont de plus en plus courts. Il faut remplir l’imprimé 3519 et récupérer sa trésorerie au plus vite !

Un contrôle de TVA « dans l’année » est irréalisable : l’administration ne peut pas vous prouver que la facture fournisseur postée le 29 est arrivée le 1° du mois suivant,  plutôt que le 30 de ce mois (et la TVA déduite).
UNE (une seule) déclaration mensuelle de TVA « bidonnée » est donc sans conséquence et permet de préserver la trésorerie. Mais attention, ce jeu est dangereux : il faut que tout soit déclaré le 31 décembre pour la CA12.

URSSAF

En cas d’accident de trésorerie gravissime, la part salariale des cotisations sociales DOIT impérativement être payée dans les délais (ces cotisations sont une partie du brut gagné par les salariés ; ne pas les payer constitue un vol). L’URSSAF accepte alors de négocier des délais pour la part patronale.

LES BANQUES ELLES MEMES

En premier lieu, il ne paraît pas utile de multiplier le nombre de comptes bancaires.
La PME française moyenne ouvre un troisième compte en banque quand elle a créé son 20° emploi. Sans avantage tangible. Mais en multipliant les frais, et en étant partout un petit client sans importance.
A l’inverse, la PME allemande s’en tient souvent à sa seule « Haus Bank ». Sans préjudice apparent.
Disposer de comptes dans 2 établissements doit suffire à faire jouer la concurrence lorsque cela s’avère utile.

En second lieu, les jours de valeur sur les chèques, les virements, les prélèvements existent toujours dans la plupart des établissements. Il est nécessaire de connaître ces détails … et de négocier âprement. Idem à propos de tous les frais pour lesquels les banques inventent journellement de nouvelles appellations.

2. COMMENT GERER LA TRESORERIE ?

Le but théorique de la gestion de trésorerie est le solde zéro, les excédents étant placés sans délai sur des comptes rémunérés.
Mais, le rendement des sicav monétaires en euros – sans risque -  est aujourd’hui (mars 2011) réellement déprimant.
De fait, le seul placement de trésorerie lucratif est l’escompte fournisseur pour paiement comptant.

2 %  ou même 1% par mois est un rendement imbattable !

L’astuce est de négocier toutes les clauses du contrat (et le prix) et de ne proposer le paiement comptant qu’à la dernière minute.
Dans la réalité, gérer sa trésorerie rend des prévisions indispensables.
Elles seront mensuelles. Elles ne seront pas mises à jour en temps réel, facture après facture, encaissement après encaissement : la charge de travail est infiniment trop lourde … et coûteuse, pour des résultats qui sont, de fait, peu utilisés.


Un plan de trésorerie établi 1 fois par an (2 fois si la trésorerie est fragile) suffit pour :
+ Prévenir les banques AVANT l’occurrence de découverts. C’est absolument indispensable.
+ Négocier la durée et le montant des facilités (prévoir « large » pour être certain de tenir le montant et la durée accordés).
+ Obtenir ainsi des conditions moins onéreuses et rester un client fiable de la banque.

A lire également :